mercredi 14 octobre 2009

Life is poker, l'interview de Lionel Rosso

Journaliste pour Europe1 et Canal Plus pendant des années, Lionel Rosso travaille désormais pour la Française des Jeux ou Direct8. Présentateur du World Poker Tour, il a voulu en savoir plus sur le jeu et découvrir la richesse de cet univers. Résultat, un regard sur le rapport entre vie quotidienne et poker mais surtout un bouquin à passer aux sceptiques et aux pourfendeurs d'un jeu qui a bien changé depuis les parties de gangsters se finissant arme au poing. Interview.

Pourquoi écrire un livre sur le poker ?
Lionel Rosso : "L'idée m'est venue pendant les tournages du World Poker Tour sur Canal en discutant avec Patrick Bruel. J'avais déjà publié deux livres sur le foot chez Calmann-Lévy (Politique Football Club et Coach Vahid) et le directeur de collection est devenu un bon copain. Quand j'ai proposé l'idée d'un livre sur le poker, on a échangé et il a dit banco...

Quel était le concept de départ ?
L'objectif c'est d'établir des passerelles entre le poker et la vie. C'est à dire que ce qu'il se passe à une table est une métaphore de la vie. On peut se servir des règles, des réflexes, des attitudes ou de sa capacité à décrypter les autres joueurs dans la vie quotidienne. C'est un bon moyen de se connaître, de s'améliorer dans son rapport à l'autre.

J'avais aussi envie de me pencher sur le phénomène, envie de savoir pourquoi tellement de gens sont attirés par ce jeu, pourquoi c'est à la mode et c'est devenu un phénomène de société. Il y a donc deux parties dans le livre, une partie plus psychologique avec des témoignages et un volet plus sociétal qui permet de dresser ce qu'est le poker en France aujourd'hui.

Faire un livre où vous racontiez vos anecdotes sur ce monde très riche ne vous intéressait pas ?
Mon livre n'est surtout pas un livre pour progresser ou faire du poker son métier. J'aurais pu raconter aussi des anecdotes mais j'ai souhaité faire un livre qui ne s'adresse pas aux spécialistes car je n'ai pas de légitimité pour conseiller. Je voulais que les gens qui démarrent juste et surtout que ceux qui n'ont jamais joué y trouvent leur compte. Le but c'est de toucher un large public. Pour un guide du comment savoir jouer, il y a déjà plein de références...

Vous avez rencontré plusieurs personnalités pour faire ce livre, qui vous a le plus marqué?
Même si Patrick (Bruel) ne figure pas sous forme de témoignage, c'est quand même lui qui m'a inspiré, qui a déclenché en moi ce lien entre le poker et la vie car, nous sommes d'accord, s'inspirer du poker pour réussir dans la vie, c'est possible.

Le témoignage de Raymond Domenech m'a marqué lui aussi car il se livre vraiment sous un autre jour qu'en conférence de presse à Clairefontaine. Il est en contradiction avec l'image que l'on montre dans les médias et je crois que ce n'est pas un bluffeur. Pour lui c'est bien simple, quand on voit un as au flop et que l'on a une paire de Rois, on jette ses cartes. Dans la vie de tous les jours ou au foot, il ne prend pas non plus de risques insensés. C'est à dire que lorsqu'il appelle Yohan Gourcuff et que celui ci ne joue pas à Milan, ce n'est pas un bluff. Quand il convoque Sydney Govou alors que celui n'a pas joué depuis un mois pour jouer contre l'Italie, c'est qu'il croit en lui (doublé de Govou contre l'Italie pour une victoire trois mois après la finale de la Coupe du Monde 2006, ndlr). Le rapport que Domenech entretient avec le poker et le rapprochement avec son comportement dans la vie, c'est ce qui m'a vraiment marqué dans ce livre.

Quelle place prend le poker dans votre vie personnelle ?
Ce que j'écris dans mon livre m'habite vraiment en permanence au quotidien, dans la conduite de mon projet de vie. Sinon, je suis un joueur médiocre et plutôt de Cash-game. Je suis prudent et quand je bluffe, je bluffe avec un petit quelque chose. Après je joue fréquemment mais irrégulièrement. Un peu plus quand c'est plus calme niveau boulot. Je ne refuse pas une petite partie et je joue parfois sur l'ordinateur. Cet été je suis allé à Las Vegas et je me suis bien fait plaisir, parfois je vais aussi en cercle. J'ai fais la réouverture du Cercle Haussmann il y a quelques semaines.

La passion pour le poker peut amener une addiction très forte et provoque parfois une peur énorme chez les gens qui ne jouent pas...
Le joueur de poker pro a choisi cette vie là et s'il ne fera peut être pas ça toute sa vie, il en tire un certain plaisir et aussi une revenu. Le joueur régulier, il est responsable et généralement se fixe des limites auxquelles il se tient. L'addiction, c'est une maladie, c'est une drogue, on parle de dépendance ou d'une pathologie. Cette minorité existe et il faut le dire car elle se met en danger ainsi que son entourage. C'est pour cela qu'il faut un poker responsable. Mais l'addiction est un sujet sur lequel je resterais prudent.

Et le bad-beat ?
Il faut vivre avec, dans la vie aussi on prend des mauvais coups. Parfois on croit passer haut la main un examen et on se plante, cela ne nous empêche pas de repartir et d'aller de l'avant.

Vous vous fixez donc des limites de jeu...
Je joue des petites parties où je ne fais pas n'importe quoi. Je ne cherche pas à vivre du poker et je pense que je n'y parviendrais pas. Je me considère comme un observateur éclairé plutôt que comme un spécialiste de ce jeu. Mon livre est un travail journalistique du aux circonstances de la vie et à mon immersion dans ce monde là. Je l'ai découvert au fur et à mesure et j'ai eu envie de comprendre. Aujourd'hui je suis très très loin de jouer 30% de mes revenus sur cette activité passionnante !

Avez-vous eu un petit pincement au coeur avec la reprise de la diffusion du WPT sur Canal Plus ? Avez-vous regardez ?
J'ai quitté Canal de mon plein gré pour une meilleure vie et pleins de projets mais c'est vrai que le plus dur à abandonner ça a été cette émission là. Je n'ai pas de pincement au coeur car je ne regrette rien, plutôt un peu de nostalgie. J'ai pris beaucoup de plaisir et je garde beaucoup d'affection pour l'émission. J'ai aussi beaucoup appris sur le phénomène poker mais aussi sur la vie grâce à cette belle rencontre avec Patrick (Bruel). C'est un acteur, il m'a aussi fait bien progresser dans le coté animation, rapport à la caméra...

Sinon, j'ai bien évidemment regardé l'émission qui est toujours magnifique. Je remercie d'ailleurs Patrick (Bruel) qui eu la gentillesse de parler de Life is Poker. C'est la démonstration que nous sommes restés copains et que la vie offre de belles rencontres".


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